Oui, croyez-moi, pour vivre dans la vérité, jouez la comédie….
 Albert Camus – Ouverture Femmes, femmes de Paul Vecchiali
 

Chère Hélène,

Le grand sommeil vous a emportée cette nuit. Quand la radio me l’a appris, je travaillais encore dans mon lit. J’ai tout abandonné pour revoir, séance tenante, Corps à coeur de Paul Vecchiali. Ce mélodrame populiste où Pierrot, le jeune garagiste du Kremlin Bicêtre féru de musique classique, s’éprend d’une bourgeoise. Jeanne Michèle, la pharmacienne quinqua des beaux quartiers, atteinte d’un mal incurable.Nicolas Silberg est souvent nu et si sexy dans ce film où planent les influences de René Clair et de Jacques Prévert. Vous, vous êtes transportée par le requiem de Gabriel Fauré, illuminée par la caméra d’un cinéaste léger malgré les larmes, douloureux en plein bonheur.

J’ai fermé les yeux, écouté votre timbre de voix un brin plus aigu et alangui que la moyenne. Une voix qui n’a pas peur de frôler le faux. D’alerter, dans sa bizarrerie, l’oreille du spectateur. De l’inviter à ne jamais s’assoupir pour mieux écouter la musicalité de l’oeuvre d’un auteur réalisateur.

Hélène Surgère, discrète et pourtant si solaire, il manque Jacques Demy, François Ozon, Alain Guiraudie, Olivier Ducastel et Jacques Martineau à votre palmarès bi gay du cinéma français. Paul Vecchiali*, Jean-Claude Guiguet, André Téchiné, Pier Paolo Pasolini*, Jean-Luc Lagarce qui crée pour vous Music Hall au théâtre… A l’heure où la montagne des souvenirs ne cesse de hisser son sommet, d’étaler son ombre, je réalise combien ces organisateurs de rêves ont excité ma sensibilité, aiguisé l’appétit de mes préférences sexuelles. A chacun de ces chocs artistiques, vous étiez présente à l’image. Avec tout votre corps et de tout votre coeur.
 Merci très fort.

surgere_corps_a_coeur_vecchiali_1surgere_vecchiali_corps_a_coeur_2 surgere_vecchiali_corps_a_coeur_3 L’objet du désir

Hélène Surgère a tourné 10 films sous la direction de Paul Vecchiali : Les Ruses du diable (1965), L’Etrangleur (1972), Femmes, femmes (1974), Change pas de main (1975), La Machine (1977), Corps à coeur (1977), C’est la vie (1980), En haut des marches (1983), A vot’ bon coeur (2004), les Gens d’en bas (2010).